dimanche 19 août 2012

Grotta minore

"Le refuge est doté de six dortoirs différents, trois petits et trois plus grands, d'une quinzaine de couchettes chacun, collées les unes aux autres et superposées sur deux bas flancs. Du bien rustique comme l'ont n'en fait plus. Ceux qui connaissent déjà les lieux et qui demandent à être placés dans une petite chambre, sont sûrs de se retrouver dans la Grotte.
"Je n'aime pas les caprices et encore moins les quémandeurs !" S'insurge la gardienne du refuge. La Grotte, c'est le dortoir le plus étroit, le plus sombre et le plus bas de plafond. Avec les matelas disposés de telle manière qu'il faut enjamber deux couchettes pour rejoindre celle du fond. Et si celui qui y dort, doit se lever dans la nuit pour pisser, il est sur de réveiller tout le monde en sortant !En dépit du manque d'espace et de lumière, c'est tout de même la pièce que je préfère nettoyer, car les couvertures y sont moins lourdes à plier que dans les autres dortoirs. Chaque lit est doté de deux couvrantes en laine épaisse et pesant plus de trois kilos chacune. Rien que la texture e donne pas envie de se mettre dessous ... Il faut être très fatigué pour avoir envie de s'y coucher!
Tous les matins, la corvée consiste à replier toutes les couvertures, la plupart du temps laissées en boule. Et quand elles ont été à peu près pliées par les clients, c'est tellement mal fait qu'il faut tout recommencer ...
Le coté sympa des dortoirs, c'est que l'on trouve parfois des trésors. des pièces de monnaie glissées entre deux matelas, des lampes frontales, des téléphones portables ... Il est malheureusement plus fréquent de trouver sous les matelas des bouchons d'oreille ou des mégots de cigarettes. Fumer est bien sûr interdit à l'intérieur. Mais lorsqu'il fait froid dehors, certains se planquent dans les chambres ou dans les toilettes pour s'en griller une !"
Laurence Fleury (2012), Une saison en refuge, Ed. Gypaète. and Allant vers la Grotte, Valais, Suisse.

mardi 14 août 2012

Vita del rifugio

"Un petit groupe arrive, bien plus enjoué que les deux autres.
-"Bonjour, vous êtes la gardienne ? Nous avons réservé quatre places pour ce soir. Est-ce que nous pourrions poser nos affaires dans le dortoir ?"
-"Je vais déjà prendre votre nom. Aviez-vous réserve la demie-pension ?"
-"Oui. Et on va vous commander à boire, parce qu'on a chaud et qu'il fait soif, répond le chef de l'équipe, tout guilleret. Pour moi, ce sera un Ice Tea. Et vous autres ?"
-"Un panache, un demi pêche et une pression, si vous avez."
-"Pas de chance, nous n'avons rien de tout ça."
Je l'invite à consulter la liste des boissons que nous proposons. Un tableau de plus d'un mètre de haut, accroché au mur, énonce les consommations et les plats en vente toute la journée. Bières en canettes, sodas, jus de fruits, omelettes garnies, pâtes bolognaises ou à la carbonara, assiette du berger, soupe, crêpes au sucre, au nutella, à la confiture... Le choix est vaste.
-"On va prendre quatre Heineken. Vous avez des glaçons ?"-
-"Non plus ! Vous êtes à 2500m d'altitude ! Je lui fais remarquer. Les glaçons, c'est la-haut sur le glacier qu'il faut aller les chercher." -
-"Bon, tant pis. Est-ce que vous vendez du pain ? Il nous faudrait une baguette pas trop cuite pour demain matin." La je le soupçonne de se moquer de moi. Mais il reste très sérieux .
....
-"Nous n'avons pas de baguette, et le pain avec lequel nous faisons nos sandwich est acheminé à dos d'homme depuis le village. Et si je vous en vendais deux tranches, elles seraient au prix du sandwich, le prix de l'effort. Le reste est réservé pour les repas du soir et les petits déjeuners. Le bonhomme ne trouve rien a redire et s'en va siroter sa bière ...."
Laurence Fleury (2012), Une saison en refuge, Éd. Gypaète. and Au dessus du Col du Simplon, Suisse.