mardi 14 juillet 2009

Beauty

"Donnée la vie, heureusement à perdre immédiatement, sitôt donnée, déjà perdue, bonheur, souvenue !
Je saurais: Elle va passer. Je croirais: Elle va partir. Elle ne t'aura pas embrassée. Te regarder étendue sur le sol, regarder son visage bleunuit, le ciel est toujours le même, tu l'appelles : ma beauté. Ne dis pas ma. Ne dis pas mon. Regarde sa face. Tu ne la vois pas, elle est trop là, trop loin, toi trop séparée de toi trop près d'elle. Mais tu vois le voile, la douceur. Le coeur s'arrête. Pendant qu'elle s'étend au dessus de toi, sa cape de bleumer, si c'était le rêve d'une fiancée bédouine, son sourire signifierait: nulle autre que moi ne t'embrassera jamais, ton sourire signifie: je n'oublierai jamais d'autre mère que toi. Pour que tu me rappelles. T'embrasser. La bouche sur ta bouche. Embrassée? Lèvres fermées, ferme les yeux, où es-tu ? Tu avais dit : je veux. Tu voulais dire : je veux la bouche. Tu as dit: je veux, tout ce qui n'est pas permis. Ce n'est pas permis, mais tu peux vouloir."
Helène Cixous, Préparatifs de noces au delà de l'abîme, Ed. des femmes, 1978. and Works of Camille Claudel , L'Implorante.