vendredi 16 juillet 2010

White light

"C'était la lumière qui était belle, la lumière, et les pierres. Comme si elle n'avait jamais connu cela avant, comme s'il n'y avait eu que de l'ombre. La lumière, c'était le nom de la ville qu'elle entendait depuis qu'elle était toute petite, le nom que son père disait le soir, pour qu'elle s'endorme avec. Le nom était devant elle, devant Elisabeth, quand elles marchaient sur le chemin de cailloux, à travers la forêt, pour aller en Italie ...



Le bleu du ciel donnait le vertige. Les rochers brûlaient d'une flamme blanche. La lumièe était si violente que les larmes coulaient de ses yeux. Elle s'asseyait par terre, la tête appuyée sur ses genoux, le col de son manteau relevé jusqu'aux oreilles. C'était là que Jacques Berger l'avait retrouvée, un matin, et après cela, il l'avait accompagnée chaque jour. Peut-être qu'il avait suivi ses traces, ou bien il l'avait épiée de loin, quand elle courait à travers les rues jusqu'à la montagne. Il l'avait appellée par son nom, en criant fort, et elle s'était cachée derrière un buisson. Ensuite quand il était passé, elle était redescendue, jusqu'à un vieux mur. C'est là qu'il l'avait rattrappée. Ils avaient marché au milieu des pins, il la tenait par la main. Quand il l'avait embrassée, elle s'était laissée faire, tournant la tête de côté pour fuir son regard. Jacques parlait des dangers qui étaient partout à cause de la guerre." Jean Marie Gustave Le Clezio (1992), "Etoile errante", Gallimard, Paris. and Sur le chemin de la Liberté, in Le Mercantour, Alpes maritimes.